Ex-voto du vaisseau le Brézé, Québec

Pour Charles et les amis du Québec... c'est à dire tout le monde.

Le 27 mai 2022,  le Musée national de la Marine est contacté par courrier par Mgr Denis Bélanger, de Québec, qui désire faire restaurer l’ex-voto du vaisseau le Brézé exposé en l’église Notre Dame des Victoires et lui demande assistance. Le MnM transmet sa demande à L’Association des Amis du Musée national de la Marine (AAMM), dont je suis un membre connu, laquelle travaille en étroite collaboration avec le musée et en particulier avec ses restauratrices. Comme à son habitude, l’AAMM se débarrasse du problème en appliquant son principe bien connu : refilez ça à Alain, lui, il saura.

Je prends donc contact avec Yves Garneau, le chargé de mission de Denis Bélanger.

Voila le Brézé.





Le navire arrive à Québec le 30 juin 1665 après un interminable périple, puisque parti de Brouage le 26 février 1664, il passe d’abord par Cayenne et les Antilles (Martinique, Guadeloupe, Saint-Domingue). A son bord, Alexandre de Prouville, marquis de Tracy. Le Brézé n’est pas seul car l’expédition transporte le régiment de Carignan-Salières fort de mille hommes, en appui des quatre compagnies commandées par Tracy. Ils viennent en renfort pour pacifier les Iroquois, dont les raids incessants terrorisent les colons.

C’est durant ce voyage de 16 mois qu’un ou plusieurs matelots construisent la maquette du Brézé. Elle est offerte par Tracy à l’évêché. Devenu ex-voto, il est installé dans la nef de la cathédrale, jusqu’à son incendie en 1759. Par chance, il échappe à la destruction.

Pour un modèle non réalisé en arsenal par des professionnels, il est de belle facture. Le Brézé a été (mal) restauré dans les années 1950. L’idée initiale de Mgr Bélanger et de son équipe était soit de reconstruire un nouveau modèle soit de restaurer l’original.

Voici donc des extraits de mes échanges avec Yves Garneau :

Bonjour Yves,

Il n’est pas envisageable de reconstruire le Brézé, puisque, compte tenu de sa date de lancement, il n’en existe aucun plan. A contrario, il est possible de rectifier les erreurs constatées sur le modèle, pour le rapprocher autant que peut se faire de la réalité historique d’un 54 canons de la seconde moitié du XVIIe siècle.

Certaines sont flagrantes :

- La carène est peinte en brun-rouge, ce qui fait penser à un antifouling actuel. Elle devrait être blanche, convention modélistique acceptée par les musées. La couleur du couroi ou espalme qui la protégeait était en réalité blanc grisâtre, jaunâtre du fait de la composition du revêtement, brai, suif et soufre et donc inesthétique. D’où son remplacement par le blanc que l’on peut légèrement salir.

- L’extrémité du beaupré devrait être surmontée d’un perroquet de beaupré, comme tous les bâtiments contemporains.

- Le gréement du mât d’artimon est faux. A cette époque, il n’y a pas de perruche, mais seulement le perroquet de fougue et, en conséquence, la hauteur du mât est moindre. Il n’y a donc pas de seconde hune, mais de simples barres. Il n’y a pas non plus de haubans au dessus des barres.

- Toujours sur l’artimon, il manque l’antenne sur laquelle s’envergue la voile latine.

- Sur tribord. Les porte-haubans de misaine et de grand-mât ne sont pas au bon emplacement. Sur les photos trouvées sur le net, on voit qu’ils sont au dessus des sabords de la batterie haute. Cette disposition n’apparaît qu’au début des années 1740 (dans la marine française comme dans la Royal Navy). Préalablement ils sont situés sous les sabords, avec le risque d’enflammer les haubans.

- Sur bâbord. Le porte-hauban de misaine est correctement positionné, mais il manque les deux autres. Les haubans sont donc accrochés sur la lisse d’appui du plat-bord, ce qui est inconcevable.

- La batterie basse est percée à 16 (en principe plutôt 12 ou 13), la batterie haute à 14. Mais comme l’écrit Jean Boudriot, «vaisseau de 50» n’est qu’une commodité de classement, l’armement réel pouvant varier de 44 à 60 canons. Nous retiendrons le percement du Brézé comme correct, d’autant que certains sabords arrières de la batterie haute peuvent n’être que les fenêtres de couchettes d’officiers.


Par contre, il faudra abaisser le mantelet du premier sabord de la batterie basse, qui ne sert qu’en chasse, n’est généralement pas armé et est fermé pour ne pas embarquer d’eau.
…

Au point de vue documentation, Léa Surrel va rechercher si le Musée détient des plans de navires similaires, datant d’une époque pas trop tardive par rapport aux années de service du Brézé et, en particulier de 1665, date de son passage à Québec.

J’ai trouvé dans le Dictionnaire des bâtiments de la flotte de guerre française, tome I, de Jean-Michel Roche, mention du Brillant I, un 56 canons de 1670 également appelé le Furieux, qu’il ne faut pas confondre avec le Brillant II de 1690, connu pour avoir servi de modèle à Hergé pour la Licorne, mais qui de notre avis est trop tardif. 40 ans entre les deux lancements, c’est beaucoup si l’on considère l’évolution rapide de la construction navale. A contrario, le Brillant I pourrait être intéressant.

Un document qui peut vous être utile, c’est l’Album de Colbert de 1670, une étude qui, en 50 planches, décrit l’intégralité de la construction d’un vaisseau. Il s’agit d’un 84 canons, mais ce qui le différencie visuellement du Brézé, c’est l’armement des gaillards et de la dunette. La batterie basse est percée à 16, comme ce dernier.
…
Le Brézé appartient à la classe des vaisseaux de 3^e rang, jaugeant de 1000 à 1200 tx , longueur moyenne entre perpendiculaires 130 pieds, armement de 52 à 58 canons. Sa batterie basse est percée à 12 pour des pièces de 18. Selon l’État général des vaisseaux du roi, il n’y a que 9 bâtiments du 3^e rang en 1660, dont forcément le Brézé. En 1665, date de son passage à Québec, ils sont désormais 25.

Dans son Vaisseaux du Roi Soleil, Jean-Claude Lemineur écrit : « Les premiers vaisseaux de ce type remontent au temps de Mazarin. Vieux d’une quinzaine d’années déjà en 1661, ils ne purent se maintenir au-delà des premières années 1670. Le Brézé fit naufrage en 1665 ».

Léa Surrel m’a aimablement envoyé les plans suivants, assortis du commentaire que je reproduis.

… les plans du Brillant que nous conservons sont ceux du vaisseau lancé en 1725 et les plans du Furieux ne font pas partie de nos collections. Je vous propose néanmoins le lien suivant : Il s'agit des plans :

- Plan-7388 : Proportions d'un vaisseau de 50 canons : élévation longitudinale, échelle 35 pieds, [16--?]
- Plan-7375 : Coulomb fils, Proportions d'un vaisseau à deux ponts par Coulomb fils, échelle 40 pieds, [ca 1685]
- Plan-6960 : Proportions du vaisseau le Neptune (prévu) pour porter 40 piesse de cannon, qui est du quatrièsme rang : plan de construction, échelle 40 pieds, Brest, 8 janvier 1679.
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Je fais deux remarques :

- Sur le Neptune dessiné par Etienne Hubac, il n’y a que deux sabords de retraite. Sur les petits vaisseaux, c’est devenu la règle. Mais elle ne s’applique pas au Brézé plus ancien et ses quatre sabords sont historiquement corrects.

- Sur le plan 7375, Le vaisseau est percé à 13, disposition peu fréquente avant 1670, puisque l’on ne connait que huit unités de ce type. Willem Van de Velde l’aîné a dessiné l’un d’entre eux en 1673.

Batterie haute. Le dernier sabord de poupe est en fait l’accès à la bouteille.

Techniquement, il est possible de rectifier l'erreur de percement des sabords, mais ce serait dénaturer le modèle qui, pour un ex-voto, est de belle facture. Mon avis est qu'il faut lui conserver son authenticité.
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Aux dernières nouvelles, l'équipe dispose d'un budget de 50 000 $CAN, ce qui est largement suffisant pour effectuer les travaux de restauration.


Une dernière chose, si ils font faire une analyse dendrochronologique (c'est une question de coût) et si elle confirme la datation, le Brézé serait le plus ancien modèle réduit français connu.

Et voila. Charles, le régional de l'étape, a suffisamment d'informations pour organiser une petite visite avec ses proches et leur faire regretter d'être venus.

Hum. Je me goure sans doute mais je crois qu’Hubert Sicard avait été approché à un moment pour en faire la restauration vers 2011,2012 je crois mais sa santé à ce moment…..


Ceci se serait produit après qu’il at présenté sont Navire Le Boullongne qui est maintenant dans l’entré du Château Ramzay à Montréal en 2009


Comme Hubert habitait à St. Thérèse pas loin de chez moi j’ai visité sont atelier à plusieurs reprise qu’elle superbe homme d’une générosité sans pareil

Hubert, il s'était fait une belle notoriété. Les modélistes lui doivent beaucoup.